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mercredi 20 juillet 2011

Wassila 2

A peine arrivées dans le bureau de Wassila qui nous accueille comme d'habitude avec son sourire bienveillant, nous évoquons les nouvelles de la veille : le jeune garçon de 14 ans tué par un policier à Sidi Bouzid. Assise derrière son bureau, en apparence calme, Wassila nous fait part de son inquiétude : "On ne sait pas ce qu'il peut se passer... On a peur d'un coup d'état..."


Wassila estime que les femmes ne s'en sortent pas si bien à l'issu de la révolution. " Malgré les acquis des femmes dans le code du statut personnel (CSP), la mentalité n'a pas changé. Au contraire, ces dernières années, ça a régressé. Une femme célibataire (qu'elle soit veuve ou divorcée) est toujours mal vue. Les hommes ont une mauvaise vision des femmes et les femmes aussi envers elles-mêmes. Il y a une concurrence entre hommes et femmes. On accuse les femmes d'être responsables du chômage, de ne pas s'occuper assez de leurs enfants. Les islamistes proposent de donner une prime de chômage aux femmes pour les encourager à rester au foyer. Mais ce n'est pas dit officiellement. Durant la révolution, l'image des femmes mise en avant était plutôt celle de la mère ou de la femme du martyr. Pourtant elles ont subi toutes les différentes répressions. Bien sur, il y a eu aussi des femmes torturées et violées en prison mais ça reste un vrai tabou : on n'en parle pas".
Je demande à Wassila quelle est, selon elle, la spécificité du féminisme tunisien. "La condition  de la femme tunisienne n'est pas la même que dans d'autres pays musulmans arabes. Le statut du code personnel, en 1956, est un vrai acquis. Le problème de la polygamie ne se pose pas... Mais on a peur de la tendance islamiste qui peut revenir car ils ont un point de vue différent sur la morale notamment concernant la polygamie qui est permise par la charia." Je me rends compte à quel point les tunisiens se perçoivent d'abord dans le contexte arabo-musulman et non par rapport à un pays colonisateur comme la France par exemple. La comparaison se fait donc naturellement sur un niveau horizontal (pays arabo-musulmans colonisés) plutôt que pyramidal (pays occidentaux colonisateurs comme la France).
Dans les premières années de la dictature de Ben Ali, il était interdit de porter le voile. Les femmes se faisaient parfois arrêter dans la rue et emmenées au commissariat où on les obligeait à retirer leur voile et à signer un papier les engageant à ne plus porter le voile. Cette dictature anti-religion a été mise en place au moment où les islamistes représentaient un pouvoir suffisamment fort face à Ben Ali pour qu'il veuille les éradiquer. Wassila tente d'expliquer la situation : "Nous, on veut la Tunisie pour tous, moderne, démocrate. Notre problème n'est pas l'islam, c'est un faux problème. La vraie question est : que faire après la révolution, qui est un véritable acquis. Car il faut résoudre le problème du chômage, de la pauvreté, du déséquilibre entre régions, de la liberté et du respect de l'autre. Depuis des décennies, la société tunisienne a vécu avec l'islam et les autres religions. Il ne faut pas diviser les gens..."

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