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vendredi 22 juillet 2011

La constitution (Mahdia 2)

Les chambres ne sont pas encore distribuées que nous devons nous rendre dans la salle de réunion située entre la boîte de nuit et le SPA (massages, hammam etc...). Il est 14h30 et une agitation bon enfant règne dans la salle. Tout le monde n'est pas encore arrivé malgré l'annonce faite au micro. Sur une petite table, différentes associations participantes ont déposé leurs dépliants d'information. Certains sont en arabe, d'autres en français et en arabe. J'y retrouve l'Association Tunisienne des Femmes Démocrates (ATFD) et croise Meriem, féministe trentenaire que nous devons rencontrer pour une interview. C'est elle qui va représenter l'association durant ce week-end. Mais pour le moment, nous cherchons des chaises disponibles. Sur chacune d'entre elles a été disposé un sac contenant un calepin et un stylo à l'effigie du congrès "Pensons notre constitution". Tout est écrit à la fois en français et en arabe. 

Après quelques dizaines de minutes d'attente, l'avocate Dalila Hazgui prend le micro pour présenter la journée... en arabe. Et c'est tout à fait normal car nous sommes en Tunisie, qu'il s'agit d'assises nationales tunisiennes et que nous sommes en réalité une petite poignée de français à être présents... Azza, la fille de Fathi propose de nous traduire vers le français. Entre temps, un homme s'est présenté sur l'estrade. Nous ne comprenons rien à ce qu'il dit, mais le ton grandiloquent de son discours m'effraie un peu. Après les premières traductions d'Azza, nous comprenons que l'homme est un comédien : il file la métaphore avec humour et brio. Son idée conductrice est "La révolution d'une vache sur le taureau". Il s'agit en réalité d'un jeu de mot : la vache est celle que l'on traite, que l'on exploite, la métaphore du peuple tunisien. Mais, nous explique Azza, en arabe le mot "révolution" est très proche du mot "taureau" (Thaour pour taureau et Thaoura pour révolution). 

La chevelure d'Azza...
Certains traits d'humour nous échappent car la salle a l'air d'apprécier particulièrement le discours de l'humoriste. Les rires fusent fréquemment et Azza, sourire aux lèvres continue sa traduction : "Aujourd'hui, il y a encore des gens qui veulent qu'on se taise... Je réponds (...) Notre vache est une vache de dignité. Notre vache est un exemple pour le monde. RévolutionnairEs, le trône du taureau est vide... Il faut occuper la place temporairement sinon les choses vont partir dans tous les sens. Aujourd'hui on va fixer la carte de route. (...) L'histoire se répète, un peuple se révolte contre un taureau malgré l'oppression et les organes reproducteurs du Ministère de l'intérieur... Nous sommes déterminés à réduire tous les organes des taureaux...".

Azza traduisant à Monika
Couper les couilles des dictateurs plutôt que trancher les têtes... c'est une idée. A chacun sa révolution! Ceci est une métaphore bien sûr, ne l'oublions pas. Je ne ferais pas ici d'analyse de genre mais il est assez intéressant de voir à quel point la sexualité est présente même en politique. Le taureau, masculin symbole de la force et du pouvoir, face à la vache, symbole féminin du peuple faible et opprimé. Le spectacle suivant n'aura pas besoin de traduction car il est sans parole. Plusieurs personnages représentant différents stéréotypes sociaux (le vendeur de légumes, la femme voilée, l'étudiant, le riche, la femme libérée, le religieux etc...) défilent sous nos yeux et nous comprenons le geste final lorsque le jeune révolté finit par retourner sa veste devant le retour des puissants, suivi par les autres personnages.

L'avocate reprend la parole : "Nous avons présenté des spectacles pour redonner sa place à l'art et à la culture de notre pays qui étaient mourants..." Et je me dis que les français feraient bien d'en prendre de la graine car généralement l'art est toujours considéré comme la "cerise sur le gâteau", le loisir que l'on met tout à la fin (des grandes réunions, des médias etc...), lorsque les choses "sérieuses" ont été évoquées. Comme si l'art avait une place subalterne, comme si l'art n'était pas politique...

(> Parmi les intervenants de la journée : Le professeur Sadok Belaid, le philosophe Youssef Seddik, etc... )

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