A 11 heures, je rejoins Amira dans le quartier du Bardo où vit sa famille à Tunis. Elle est très fière d’aller voter dans son ancienne école primaire Saïdia. Dans ce quartier de l’est tunisien où elle a grandi, Amira connaît beaucoup de monde. Sur le trajet qui nous amène vers l’école, les voitures klaxonnent, elle dit bonjour, s’arrête trois secondes pour discuter avec des voisins et des voisines qui eux ont déjà voté car les bureaux de vote sont ouverts depuis 7 heures du matin. Nous rejoignons un petit groupe. On se salue, on s’embrasse, on continue de parler politique parfois vivement même si l’on s’aime bien car ici tous les jeunes ont grandi ensemble.... Un américain, professeur de politique vivant à Paris, écoute avec attention. Il me dit en deux mots comment il perçoit l’ambiance : « Joie et inquiétude ». C’est également mon ressenti : joie d’aller voter enfin et inquiétude quand aux résultats… Fedia, une amie d’Amira, comme elle membre de l’OCT (Organisation de Citoyenneté Tunisienne) et qui a participé à la constitution de Mahdia se joint à nous ainsi qu’Insaf, la sœur d’Amira. Insaf va voter pour la liste indépendante Doustourna, qui regroupe plusieurs associations dont celle de sa sœur. A ma grande surprise, Amira a décidé de ne pas voter pour cette liste : « Jusqu’à hier soir je pensais voter Doustourna mais lorsque j’ai vu qu’Ennahda (le parti islamique nda) allait avoir beaucoup de voix, j’ai décidé de voter utile et de soutenir le PCOT ». Son discours me rappelle de mauvais souvenirs (dans une autre mesure et d’autres circonstances bien sûr…). Sa sœur Insaf n’est pas d’accord : « Il faut voter pour les petites listes car à l’assemblée il restera des places pour les petits partis qui peuvent acquérir au moins 1 siège. » Sur les radios, les spots incitant à aller voter tournent encore aujourd’hui. Et bien que le Président de l’ISIE (Institut …) ait déclaré officiellement aux gens qu’ils ne devaient pas prendre en compte les sondages pour leur vote, les rumeurs circulent...
A gauche, la file des hommes |
Dans la foule qui se presse devant l’école, encadrée par des militaires, je remarque deux files : à droite celle des femmes et à gauche celle des hommes. » La file des femmes est plus courte que celle des hommes, constate Amira, probablement plus d’hommes vont voter. » Fedia, elle, trépigne de colère : « J’aimerais bien me mettre dans la file des hommes. Mais je ne peux pas car je suis connue dans le quartier et l’on pourrait embêter ma famille en critiquant mon comportement ». Je demande à Fedia comment s’est décidée cette séparation sexuelle : « Ça a été spontané, dans certains quartiers les gens se sont mélangés ! Ici un petit groupe d’homme s’est mis d’un côté puis un groupe de femmes et au fur et à mesure ça s’est instauré comme cela. »
Amira attend son tour dans la file des femmes |
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