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dimanche 23 octobre 2011

Les élections 6 : Discussion politique au café après le vote

Une fois qu’elles ont voté et que nous sommes enfin dehors, je propose à Fedia et Amira de leur offrir un verre au café. Après un moment d’hésitation où Fedia m’explique que le dimanche elles sont censées plutôt rester avec la famille, elles décident d’aller dans un café un peu éloigné de Saïdia. Fedia préfère que les gens ne la voient pas fumer, ils pourraient « parler ». Je me rends compte à quel point le regard et le jugement de l’autre est encore très présent dans le quotidien. Attablées à l’intérieur d’un café assez chic, nous commandons à boire. Fedia discute en arabe avec la serveuse qui dit ne pas savoir pour qui voter. Je vois Fedia et Amira tenter de dessiner le logo du PCOT mais la faucille et le marteau ne sont pas évidents à reproduire. La serveuse finis par comprendre. Mais le patron arrive aussitôt et une discussion très vive éclate entre lui et Fedia. Je ne comprends pas les paroles mais je devine que l’homme est contre le PCOT. Fedia semble vivement attaquée. Une fois qu’il est enfin parti Fedia me dit qu’elle est mécontente car l’homme a traité son parti « d’opportuniste ». Il va certainement voter pour Ennahda.


Fedia m’explique que dans sa famille tout le monde est syndicaliste et de gauche. Son père, professeur est délégué syndical ainsi que sa mère, également professeure, bien qu’elle ait dernièrement mis de côté ses activités militantes. Fedia se dit presque déçue de suivre si facilement la voie de ses parents tous deux à gauche. Ce n’est pas le cas d’Amira dont le père est conservateur à tendance islamique : « Depuis hier toutes mes tantes m’appellent pour me demander de ne pas voter PCOT, que c’est mauvais pour le pays etc… C’est mignon ! » dit-elle dans un sourire plein d’affection. Puis à nouveau, je ressens ce mélange de joie et d’inquiétude chez les deux amies. Bien qu’il n’y ait officiellement aucun résultat, les sondages indiquent 30% de vote pour Ennahda, le parti islamique. L’inquiétude est réelle. Fedia nous dit : « J’ai toujours été optimiste jusqu’à aujourd’hui. Mais la démocratie toute seule ne peut rien. Par exemple, Hitler a bien été élu démocratiquement ! Ici, il n’y a pas d’éducation politique, pas de conscience, on n’a pas été éduqués. On est naïfs, on croit aux belles paroles… La gauche ne s’est pas unie, chacun a  travaillé pour son compte. Il faut que la gauche change et se rende compte qu’il faut s’unir ! » Amira renchérit, amère : « J’aurais aimé que ce soit une élection présidentielle pour qu’ils se rendent compte tout de suite des conséquences de leur choix… ». Fedia explique, rêveuse : « J’aimerais que dans la constitution, il y ait un point sur la souveraineté du peuple, qu’elle soit horizontale, tout en restant en contact avec le peuple. » « Les autres pays ont des agendas pour nous » poursuit Amira. « On n’a pas notre propre agenda, reprend Fedia, au niveau économique il faut un changement international, contre le capitalisme… Avec les indignés ça va bouger ! Pourquoi attendre 20 ans avant de faire une nouvelle révolution ? Economiquement, je ne vois pas de changement, les pauvres ne vont pas s’enrichir car les gens d’Ennahda sont très libéraux, capitalistes… » Je demande à Fedia si le mouvement des indignés est suivi en Tunisie : « Il n’est suivi que par les élites ! Quelques uns ont appelé à faire un mouvement le15 octobre mais il n’y avait personne. Le peuple tunisien ne veut pas faire de sacrifice maintenant. On n’est pas encore individualistes en Tunisie, il y a peu de SDF, la famille s’occupe des gens même si l’état ne s’en occupe pas. » Nous parlons des risques éventuels d’alliances de certaines listes avec Ennahda : « Si le PCOT se lie avec Ennahda, je vais devant leur local avec une pancarte pour dire « J’ai voté pour toi et tu m’as trahie ! »s’écrie Fedia. Amira considère que « l’intérêt de voter pour le PCOT est que l’on sait où ils se situent contrairement aux listes indépendantes dont on est moins sûrs.. »

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