Un an et demi après la révolution et
un an après mon premier voyage, je retrouve Tunis et l’avenue Bourguiba.
Je remarque l’absence de barbelés sur
la place de l’indépendance et devant l’ambassade française. La statue de Ibn Khaldoun qui se dresse
entre l’église et l’ambassade de France le visage tourné vers l’horloge de l’ancien
dictateur Ben Ali, à l’autre bout de l’avenue Bourguiba semble toujours dépitée
de se trouver là dans cette Tunisie contrastée du XXIème siècle…
Dans les rues adjacentes au Marché
central, les vendeurs ambulants ont repris les trottoirs : tee-shirt,
slips et tongs made in Asia jonchent le sol sur des tapis de fortune. Les yeux
furètent partout à l’affut des policiers.
Sur le bitume luisant de soleil, les
chats errent indifférents aux humains, toujours aussi maigres, ils trainent
leur carcasse dans l’espoir de trouver au détour d’une poubelle un déchet comestible.
Gare de Barcelone, les nouveaux
trains de la banlieue sud, rutilant neuf et détonnant avec les quais restés en
l’état, ont des beaux sièges et la clim. On ne voit plus les adolescents
rêveurs, le nez au vent sur les marches des portes déglinguées, le regard perdu
dans le paysage défilant.
Sur les murs de l’avenue Bourguiba
les slogans révolutionnaires ont été effacés et près du Théâtre, derrière les
grandes publicités pour la banque BIAT un immeuble se construit qui accueillera
ses bureaux.
Tandis que sur la place de l’UGTT,
les travailleurs syndicalistes manifestent pour leurs droits, des hommes
s’arrêtent devant les kiosques à journaux qui prolifèrent sur les trottoirs
pour regarder les gros titres. A l’ordre du jour, un conflit qui oppose le
président provisoire Mr Marzouki et le premier ministre provisoire membre
d’Ennahda à propos de la décision de ce dernier de renvoyer un réfugié
politique libyen contre l’avis du président. A l’heure qu’il est, si l’homme
n’est pas mort, la torture aura bien entamé son espérance de vie.
A part cela, les derniers événements
semblent être le fait de salafistes…
Aujourd’hui où est l’esprit de la
révolution ?
Caché dans le cœur des activistes
associatifs, syndicalistes ou partisans, surfant sur internet, dans les blogs
et autres réseaux sociaux, ou lové dans les yeux de ceux qui pensent à la
révolution de demain.
Attaqué de toutes parts, l’esprit de
la révolution semble en suspens dans la moiteur de l’été tunisien.
Tandis que
celles et ceux qui ont formé l’étincelle vive de ce qui allait entraîner tout
un peuple vers la révolte pacifique contre son bourreau et entraînant sa chute,
les adeptes de l’ancien dictateur dont les pires exécutants n’ont à ce jour pas
été punis pour la plupart tentent de reprendre le pouvoir d’une manière ou
d’une autre. Certains ont d’ailleurs rejoints les rangs des salafistes passant
naturellement d’une dictature laïque à une dictature religieuse. D’autres
tentent de reconstruire l’ancien parti du dictateur, en repeignant la façade
d’un nouveau nom. Beaucoup d’électeurs d’Ennahda ont déchanté…
On attend les prochaines élections prévues en 2013 qui
décideront du premier gouvernement de la Tunisie post-révolutionnaire. On rigole
pour ne pas pleurer des grossières erreurs révélant les incapacités des
politiques actuellement au pouvoir. Bref, on expérimente les limites de la
démocratie…
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