"Pour désigner la minute décisive, l'instant où convergent les contradictions et où s'ouvre le possible de "l'après", les Grecs anciens avaient un concept : le kairos."
Le Monde Diplomatique n°688, Juillet 2011.
J'aurais aimé trouver un mot grec qui corresponde à la période particulière de transition que connaît la Tunisie actuellement. Nous sommes après la "Révolution" dont le point culminant (le "Kairos") a abouti à la fuite de Ben Ali, et avant les élections par le peuple - ce peuple opprimé depuis si longtemps, le 24 octobre prochain (si la date ne recule pas à nouveau). Nous sommes peut-être entre deux Kairos. Ce creux de la vague qui contient, après la tempête, toutes les promesses des vagues à venir. Une sorte de moment suspendu où chaque force, de façon souterraine, se prépare à mettre en place à sa façon l'avenir.
Qu'est-ce qu'une révolution sinon un retournement de rapports de forces? Retournement dont le risque est de revenir au point de départ, tout comme la terre après avoir fait sa révolution autour du soleil repasse fatalement par le même point spatial. Avec néanmoins un certain temps passé qui l'a fatalement transformée, en bien comme en mal.
Mais tous les espoirs sont en marche. Dans le monde Arabe comme en Europe le vent euphorique de la révolution souffle et s'immisce dans les esprits réveillant de vieux rêves enfouis sous les rudesses du quotidien et les illusions de la consommation facile et futile.